Le projet d’expérimentation sur le vieillissement à la Haie Griselle-La hêtraie a marqué un premier point d’étape ce lundi 22 janvier, avec la restitution finale des travaux des étudiant.es des Master Sciences de l’éducation de l’UPEC, et la présentation des premiers résultats de l’étude menée par les étudiantes du Master Alternatives urbaines démarches expérimentales et espaces publics (AUDE-EP) de l’École d’Urbanisme de Paris (EUP).Dans le bâtiment Pyramide à Créteil-l’Échat, les étudiant.es en sciences de l’éducation ont présenté les résultats finaux de leur enquête avec pour fil conducteur cette interrogation : comment bien vieillir en Quartier Politique de la Ville (QPV) ? Ces derniers, dirigés par la sociologue Laurence Costes (SESS-STAPS), ont questionné les représentations de la vieillesse et les rapports intergénérationnels au sein du quartier, recourant à une méthode inductive. Cette approche devait leur permettre d’aller au-devant des habitantes et des habitants du quartier pour recueillir leur témoignage, sans une grille d’entretien trop contraignante à mettre en œuvre. Personnes âgées, mais aussi médiateurs, éducateurs de rue et l’animatrice du centre social… les étudiant.es ont échangé avec différents profils d’habitants. Ces échanges sont notamment intervenus à l’occasion d’un atelier organisé au sein du Centre Sociale de La Haie Griselle.
Le constat qui en ressort est que seuls la perte d’autonomie et le manque d’entourage impactent réellement les personnes, le vieillissement à lui seul n’entraînant pas d’isolement ou de mal-être. De même, les étudiant.es ont relevé une distinction nette entre les deux parties de ce quartier intercommunal : les structures de la Haie Griselle sont fréquentées essentiellement par les résidents de Boissy-Saint-Léger tandis que celles de La Hêtraie accueillent surtout les habitants de Limeil-Brévannes ; une division alimentée par un sentiment fort des habitants, d’appartenance à leur quartier. Les étudiant.es en sciences de l’éducation projettent que le grand projet de refonte du centre commercial de Boissy-Saint-Léger saura réunir ces communautés et créer un lieu social et commercial décloisonnant les deux quartiers.
Ils préconisent aussi de concentrer le travail intergénérationnel sur la plus jeune génération, dans la mesure où les 12 ans et plus se désintéressent ouvertement de lien avec les personnes plus âgées. Les étudiant.es ont établi plusieurs recommandations pour renforcer les liens intergénérationnels, à commencer par l’organisation de rencontres entre habitants (repas communs, fêtes…), l’amélioration des espaces communs avec la création de nouveaux espaces communs entre le Centre Social Michel Catonné et la maison municipale de la Hêtraie, à l’instar d’un jardin communautaire, d’un café solidaire… Ils proposent aussi d’entreprendre un projet communautaire comme le lancement d’un programme de bénévolat ou d’un potager communautaire. Ce travail exploratoire aura permis une première approche de l’expérience du vieillissement dans le quartier de la Haie Griselle – La Hêtraie.
Le même jour, à l’EUP, les étudiantes du Master AUDE-EP, encadrées par les urbanistes Pascale Lapalud et Samuel Buteau, ont présenté leurs premiers résultats. Leur recherche s’est construite autour de la problématique de l’accessibilité des espaces publics des habitant.es du quartier de la haie Griselle par les personnes âgées et les personnes en perte d’autonomie. Et quel travail ! Les 7 étudiantes ont livré un diagnostic exhaustif sur ce quartier intercommunal et la zone urbaine environnante, avec pas moins de 280 observations statiques et mobiles des déplacements des habitant.es, une analyse fine des usages de l’espace public, mais aussi un questionnaire adressé à 13 personnes, touchant leur vécu du quartier et leurs modes de déplacement, ainsi que des entretiens avec les professionnels travaillant pour le quartier. Ce travail d’enquête s’appuie sur une grille d’observation et une documentation riche, avec des photos, vidéos et croquis.
En arpentant ainsi le terrain, méthodologie à l’appui, les étudiantes font état d’une vision et d’un vécu plutôt positifs du quartier pour ses habitants qui mentionnent notamment ses espaces verts et ses lacs bien entretenus, visibles depuis les habitations. La Place du Forum qui centralise de nombreux services et activités, est aussi un lieu apprécié. La question de l’insécurité, bien que prégnante, n’empêche pas les résidents de sortir de chez eux et manifeste même une certaine solidarité, alors que des habitants vont à la rencontre des jeunes, voulant le meilleur pour eux et qu’ils ne « traînent » pas. Les observations pointent l’importance des places et l’attrait pour le jardin partagé. Mais elles révèlent aussi que la faible utilisation de l’espace public comme lieu de plaisir et de convivialité : les activités extérieures sont utilitaires (courses, La Poste, école…) et les habitants ne font que circuler au dehors. De fait, l’écrasante part des personnes observées – 93 % ! – étaient en mouvement. Seuls les hommes de 15 à 30 ans se servent de l’espace public comme d’un lieu de rencontre, notamment au pied des immeubles. Les lieux de convivialité des femmes sont quant à eux des lieux non publics, à l’instar de la Boissyclerie, du centre social et de la médiathèque, ou des lieux liés aux enfants (aires de jeux…). L’analyse des étudiantes a aussi porté sur les difficultés des déplacements à pied, montrant que les personnes chargées ou ayant des difficultés motrices empruntent les chemins les plus rapides et souvent les plus difficiles… une constante à prendre en compte dans les projets d’aménagement !
Les besoins exprimés par les habitants concernent surtout l’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite (PMR) : un accès PMR sur la passerelle desservant le Forum, des rampes dans les chemins pentus, des meilleures circulations avec les travaux en cours… Ils appellent aussi à aménager plus de lieux de convivialité et de mobilier urbain pour s’asseoir.
Ce point d’étape a donc été riche en retours de terrain. Quelle suite donner à cette enquête ? Après cette analyse de l’espace public et des rapports intergénérationnels, le projet d’expérimentation sur le vieillissement au sein de la Haie Griselle, piloté par Manon Monvoisin d’E-city, s’axera davantage sur les trajectoires de vie et les besoins des personnes en perte d’autonomie et isolées, avec des entretiens biographiques et la rencontre des personnes aidantes. En plus de recueillir le vécu de ces personnes et leurs besoins en matière de service public, les recherches s’intéresseront aussi aux systèmes de solidarité informels à l’œuvre dans le quartier. Ce travail sera mené par Manon et un stagiaire, ainsi que par les étudiantes de l’EUP. Ces dernières organiseront d’ailleurs une semaine de Festival du 15 au 17 février prochains ! Au programme : un World Café autour des souvenirs, des parcours commentés au sein du quartier, des ateliers mixtes traitant des besoins des habitants dans le quartier et aussi la construction d’une carte des désirs, soit des aménagements et aménités souhaités par les résidents.
Ce quartier de la Haie Griselle n’a pas fini de nous livrer ses histoires et de construire son avenir, recherche aidante !